9 Août 2022
A la périphérie de la science – une typologie
Dans un article de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ), le physicien et philosophe Edouard Kaeser s’intéresse à la frontière de la science. Il rappelle que depuis un siècle, les scientifiques et les philosophes tentent de tracer une ligne claire entre la science et la non-science. Ces tentatives s’avèrent pourtant grossières, car elles disqualifient en bloc les théories de la « zone marginale » en les qualifiant de non scientifiques ou de pseudo-scientifiques.
L’auteur estime que face aux journaux «de comportement prédateur», restreindre les standards de publication reviendrait à «se tirer une balle dans le pied». Dans l’article, il propose alors de porter un regard plus nuancé – au cas par cas – sur ces zones floues, qu’il identifie de « sciences marginales » (fringe sciences), afin de diversifier et de préciser le jugement de pseudo-scientificité. Il dégage quatre types de sciences marginales et discute leur rapport à la science :
- La science résiduelle : Il s’agit ici de théories qui étaient autrefois des instruments acceptés et respectés d’explication du monde, comme l’Astrologie ou l’Alchemie. Elles sont toutefois considérées comme dépassées, car le consensus scientifique s’est détaché des idées qui prévalaient auparavant et a évolué.
- La science alternative : regroupe tout les pratiques de guérison tirées d’idées ancestrales et ou « non-occidentales ». Au cours des dernières décennies, une relation ouverte s’est développée entre la médecine moderne et la médecine alternative. Elle n’est pas basée sur la concurrence, mais sur la complémentarité.
- La science « anti-establishment » : D’inspiration postmoderne, ce courant veut rendre visibles les structures de pouvoir derrière la recherche de la connaissance. Par exemple, les études de genre ou les études interculturelles et postcoloniales.
- Le « dénialisme » : est plutôt une stratégie qui vise à briser un consensus de recherche en fonction des intérêts. Sous le slogan « plus de recherche est nécessaire », les détenteur-trices tentent de semer le doute afin de casser le consensus scientifique. Un bon exemple est la société de relations publiques Hill & Knowlton qui, avec ses propres recherches scientifiques en 1954 a cherché à retarder les interventions politiques sur le tabagisme.