Selon Stéphanie Balme, directrice du Centre de recherches internationales à Sciences Po, la liberté académique de recherche et d’enseignement est actuellement en péril au cœur des Etats de droit d’Europe et du monde, «affectant à parts égales les sciences humaines et sociales et les sciences expérimentales». La directrice appelle à son inscription dans la Constitution.
Dans son rapport pour France Universities, la chercheuse fait état de nombreuses atteintes à la liberté académique et de leurs conséquences en France en 2024-2025: pressions idéologiques sur les contenus d’enseignement et de recherche, annulations de conférences, campagnes de stigmatisation d’enseignants-chercheurs sur les réseaux sociaux, etc. Au contraire d’autres droits fondamentaux, la liberté académique n’aurait pas de culture politique ni citoyenne en France. Les universitaires qui en souffriraient seraient souvent isolés, et les capacités institutionnelles à contrer la problématique seraient limitées. «Cette vulnérabilité est aggravée par la dépendance aux financements publics, la précarisation des carrières, la surcharge administrative et l’absence d’autonomie institutionnelle réelle», écrit la directrice.
Elle propose alors une stratégie proactive selon 4 axes en faveur de la défense et promotion de la liberté académique:
- un renforcement du socle juridique (constitutionnalisation de la liberté académique, réaffirmation de l’autonomie des établissements et l’indépendance des personnels, reconnaissance du principe du secret des sources, …)
- des actions des universités en faveur de la liberté académique (chartes, observatoires indépendants, formation des directions, …)
- une promotion de la culture de la liberté académique dans l’espace public (campagnes nationales, …)
- une inscription de ces mesures dans la diplomatie scientifique européenne (rétablissement d’un classement européen avec un indice de liberté académique, instauration d’un observatoire européen, création d’un passeport européen pour les chercheur·euses réfugié·es, …)
Nathalie Dompnier, présidente de l’Université de Lyon interviewée à propos des menaces envers la liberté académique, souligne que la liberté académique est liée à l’indépendance des universités: «sans cette indépendance, l’institution n’a pas la capacité de protéger les chercheurs. Les universités sont les premières cibles des gouvernements populistes ou autoritaires, ce qui montre qu’elles tiennent un rôle dans une société démocratique». Selon elle, il manque aujourd’hui du soutien afin d’améliorer les pratiques de diffusion du savoir scientifique, les financements tendant à diminuer pour de telles activités de médiation. Elle ajoute qu’il faudrait également «travailler la culture du raisonnement qui aboutit à des connaissances scientifiques».
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