The Economist (accès via la BCU) a publié toute une série d’articles sur les effets de la politique de l’administrative Trump sur les sciences, aux Etats-Unis et ailleurs.
p. 10 «America’s assault on science»
Pendant que le gouvernement Trump s’en prend aux universités d’élite et à la recherche, «des véritables problèmes de fonctionnement de la science en Amérique sont négligés», notamment la bureaucratie: «Les meilleurs chercheurs américains déclarent passer deux jours sur cinq à remplir des formulaires et à effectuer d’autres tâches administratives, plutôt qu’à travailler en laboratoire. La recherche devient de plus en plus incrémentale («incremental»). De nouveaux modes de financement, tels que les loteries, méritent d’être expérimentés. Jusqu’à présent, cependant, la Maison Blanche n’a pas présenté de plans visant à améliorer le fonctionnement de la science. En effet, lorsque les scientifiques ne savent pas si leurs travaux seront encore financés ou s’ils saisissent les tribunaux pour contester la suppression arbitraire de subventions, la science américaine perd de son efficacité, au lieu d’en gagner.» Par ailleurs, les triomphes économiques américains et sa force militaire sont étroitement liés aux succès scientifiques. «En se retirant, l’Amérique cédera du terrain à la Chine autoritaire en tant que superpuissance scientifique, avec tous les avantages que cela comporte.»
p. 37 – «The revolution comes for Boston»
Les politiques du président Donald Trump sur les universités et les réductions proposées par son administration pour le financement de la science menacent non seulement l’écosystème tentaculaire de recherche et de biotechnologie du Massachusetts, mais aussi l’avantage concurrentiel du pays en matière d’innovation, en biotechnologie en particulier.
p. 68 – «The science subsidy»
Par rapport aux retombées internationales, «c’est presque certain que l’Amérique enregistre un excédent scientifique avec le reste du monde, en fournissant beaucoup plus aux étrangers qu’elle ne reçoit en retour», que cela soit par la formation des étudiant·es étrangers·ères, la publication scientifique, la recherche et le développement, la technologie, et le savoir-faire et l’investissement.
«La Chine, qui dépasse déjà l’Amérique dans certains domaines scientifiques, peut espérer tirer parti de cette situation. Pourtant, peu d’étrangers souhaitent faire leur doctorat en Chine. Un système politique fermé ralentit la diffusion des innovations au-delà des frontières internationales. Il en va de même pour la barrière de la langue.» D’ailleurs, «des décennies de recherche sur les clusters économiques montrent qu’elles sont rarement répliquées» ailleurs: «If America’s scientific system sneezes, the rest of the world will catch a cold.»
69 – 71 «Looming disaster»
Le président américain espère réduire le budget des NIH (National institutes of health) de 38 %, soit près de 18 milliards de dollars, celui de la NSF (National Science Foundation) de 4,7 milliards de dollars, soit plus de 50 %, et supprimer près de la moitié de la direction de la mission scientifique de la NASA. «Au total, les réductions proposées pour les agences fédérales de recherche s’élèvent à près de 40 milliards de dollars. Nombre d’entre elles sont déjà passées sous le bistouri», et les coupes «sont plus larges et plus profondes qu’il n’y paraît» à première vue, et de manière plus chaotique et des fournitures de laboratoire sont devenues plus difficiles à obtenir. Selon des documents fuités, la branche recherche de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) cesserait très probablement d’exister et les satellites d’observation de la Terre de la NASA seraient également mis à mal, par exemple.
71 – «Chilling effects»
Des citoyens ordinaires vont être affectés par ces coupes, comme par exemple les fermiers dépendent de prévisions météorologiques fiables, les malades ont besoin de données du CDC sur la distribution et le traitement des maladies, et l’EPA (Environmental Protection Agency) met en place des régulations qui protègent le public de contaminants, et plusieurs agences alertent le public dans le cas des différentes catastrophes naturelles.
«Le gouvernement finira peut-être par comprendre que le fait d’avertir les gens des tempêtes mortelles et de faciliter l’accès aux soins médicaux permet d’aider bien d’autres personnes que les élites. Mais pour l’instant, du moins, il y a peu de signes d’un tel revirement de politique.»
72 «Your loss is our loss»
«An exodus from the world’s scientific superpower beckons.» Le nombre de postulations pour des postes académiques hors des Etats-Unis ont augmenté de manière significative, de 32% sur le site de Nature, et selon un sondage de ce même journal, 75% des scientifiques dans les Etats-Unis envisagent de partir. Par ailleurs, des candidatures de l’étranger ont baissés de 25%, selon les données da Nature, et cette tendance est plus accentuée encore pour les candidatures au doctorat: Sur le site FindAPhD il y a eu 50% de candidatures en mois venant de l’Europe.
Les données du site web Studyportals montrent un intérêt moindre des Américains pour les doctorats nationaux et une augmentation de l’intérêt pour les bourses d’études internationales par rapport à 2024, près de 50% plus de renseignements sur les programmes en Suisse par rapport à l’année passée. Et aussi les personnes des pays non-américains s’intéressent particulièrement aux programmes PhD en Suisse, avec une augmentation de plus de 40% par rapport à l’année passée, ce qui range le pays en deuxième place après l’Australie.
«Et ce n’est pas fini.» La National Science Foundation (NSF), autre grand bailleur de fonds fédéral, pourrait perdre 52 % de son financement. Si le budget est adopté par le Congrès, The Economist estime que plus de 80 000 chercheurs pourraient perdre leurs emplois. «Le financement américain de la science universitaire serait nettement inférieur à celui de la Chine ou de l’Union européenne, après ajustement des coûts.» Et le financement n’est pas le seul problème, mais également l’insécurité actuelle concernant les visas. D’autres encore craignent que le gouvernement s’immisce dans leurs recherches. Kevin Hall, chercheur au NIH, a démissionné en avril après deux incidents : une fois, des membres du gouvernement l’auraient demandé de ne pas utiliser un mot impopulaire auprès des partisans de Trump et une fois il a été empêché de présenter une étude des collaborateurs de Robert F. Kennedy qui auraient édité les réponses aux interviews sans son consentement.
D’autres pays pourraient attirer ces chercheurs américains cherchant à s’exiler, mais «la perturbation nuirait à la science dans son ensemble».