«Après une lettre de soutien à l’action estudiantine, un autre front se forme au sein des enseignants. Une contre-pétition appelle à se distancier du militantisme.»
13 Mai 2024
13 Mai 2024
«Après une lettre de soutien à l’action estudiantine, un autre front se forme au sein des enseignants. Une contre-pétition appelle à se distancier du militantisme.»
8 Mai 2024
Par rapport aux manifestations pro-palestiniennes dans les universités suisses, Luciana Vaccaro, présidente de swissuniversities, avance que sa plus grande crainte est que les étudiant-es se fassent instrumentaliser. «Au début, seuls des étudiants ont manifesté à Lausanne. Mais entre-temps, d’autres se sont joints à eux. Je ne sais pas d’où, si c’est d’autres universités ou d’autres mouvements.» Cela compliquerait le travail pour les universités, et «[…] pourquoi un recteur doit-il négocier avec des personnes extérieures à l’université ? Une université n’est pas un parti politique avec lequel on peut négocier sa position.» Par ailleurs, elle craint une collision entre des différentes mouvements. «Notre rôle est académique, de réflexion et de compréhension – et non politique. Cela vaut aussi pour les professeurs.»
29 Avr 2024
Beat Bürgenmeier, professeur honoraire de l’Université de Genève, regrette «le silence de la plupart des professeurs de finance lors de la crise de Credit Suisse». «La recherche en finance de marché n’a guère contribué à améliorer l’expertise et a sans doute sous-estimé l’impact de la crise sur la société et l’environnement. Par ailleurs, la plupart des professeurs de finance se mettant au service du secteur financier ont manqué à leur obligation légale d’informer le public. […] la Cour des comptes serait bien avisée de mettre un peu de lumière dans des pratiques peu transparentes [concernant les activités accessoires des professeur-es]. […] C’est peut-être par ce biais que les citoyens apprendront que la collaboration entre l’université et le secteur privé est bénéficiaire pour certains, mais pas toujours pour eux-mêmes.»
Un article similaire a été publié sur le site Infosperber. Le journalist Urs P. Gasche y décrit comme des grandes entreprises ou banques ont pu exercer de l’influencé sur la recherche. [Il ne mentionne pas d’excemples très récentes.]
23 Avr 2024
Le Conseil fédéral pourrait effectuer des coupes de 60 à 80 millions jusqu’en 2025 au domaine des EPF. Les standards de l’enseignement et de la recherche ne pourront pas être maintenus de cette manière, met en garde le président de l’EPFZ Joël Mesot. La capacité d’innovation de la Suisse serait même menacée.
Le journaliste de la Weltwoche Philipp Gut contredit ces propos («Bullshit») : «Le domaine des EPF dispose d’un budget de 2,736 milliards de francs provenant uniquement de l’argent des contribuables. Et sur ce budget de plusieurs milliards, il serait impossible d’économiser quelques dizaines de millions? Si l’EPFZ ne peut pas le faire, il lui faut immédiatement des économistes d’entreprise compétents à sa tête !» Par ailleurs, le risque d’une perte de qualité viendrait plutôt de l’«idéologisation» de la recherche : «Certains professeurs de l’EPFZ et presque des domaines entiers de la recherche se sont transformés en laboratoires peints en vert dans l’esprit du temps, qui, selon l’impression du public, préfèrent faire de la politique plutôt que de la science sobre», et prend par exemple les prises de position des professeurs Reto Knutti (sciences du climat) et Kay Axhausen (sciences de l’environnement).
«Si l’ETH risque de perdre sa réputation d’être l’une des meilleures hautes écoles du monde, ce n’est pas à cause d’un mini-programme d’économies, mais à cause du bradage rampant des vertus scientifiques sur le marché de la politique.»
16 Avr 2024
Caspar Hirschi, professeur d’histoire à l’Université de Saint-Gall, estime que tout le monde s’entend comme défenseur de la liberté académique. Mais «[f]aire usage de la liberté de la science ne signifie […] pas donner des slogans préconçus sur l’actualité politique du haut de la chaire. Il s’agit plutôt d’orienter et d’aiguiser l’intérêt pour la connaissance de manière à ce qu’elle puisse faire mal, et pas seulement aux autres, mais aussi à soi-même. Or, il est frappant de constater que les controverses actuelles sur les prétendues violations de la liberté académique ne portent pas du tout sur sa signification au sens strict de la Constitution fédérale.
Rares sont ceux qui se plaignent d’être limités dans leur propre recherche et leur enseignement.» Mais pendant que la liberté académique au sens stricte «annule» des conflits de valeur en privilégiant des valeurs scientifiques par rapports aux valeurs politiques ou religieuses, «Les sanctions infligées par les directions des universités pour des déclarations publiques faites par des universitaires dans le cadre d’appels collectifs ou de tweets personnels sont presque exclusivement des pierres d’achoppement. […] Ils concernent la liberté scientifique au mieux dans le sens large de la liberté d’expression démocratique. […] Dans la présentation polarisante de cas individuels que nous devons subir quotidiennement depuis la récente escalade du conflit au Proche-Orient, cela passe complètement inaperçu. Nous sommes contraints à l’état abrutissant de la prise de parti immédiate. Au cœur de ce conflit de valeurs se trouvent des disciplines relativement récentes telles que les études postcoloniales, les études de genre et certaines parties des sciences climatiques qui se considèrent comme « activistes ». […] Pour eux, la recherche est indissociable des revendications politiques. Cela repose sur la constatation – correcte – que les valeurs scientifiques ne sont jamais totalement indépendantes des préférences idéologiques, et sur la conclusion – erronée – que les valeurs scientifiques ne peuvent pas non plus prétendre à une validité autonome. C’est pourquoi les chercheurs activistes lient directement des valeurs politiques telles que la diversité, l’anti-discrimination ou la justice climatique à la valeur scientifique de la critique et la prennent «à une courte laisse» idéologique. Celui qui refuse cette étroitesse de la critique peut être boycotté en même temps comme non scientifique et réactionnaire. Les défenseurs classiques de la liberté scientifique s’y sont opposés, mais ont à leur tour pris plaisir à boycotter les boycotteurs, ce qui a permis aux chercheurs activistes de redécouvrir la liberté scientifique à leur profit. Mais son véritable objectif a été perdu de vue depuis longtemps dans ce spectacle indigne de l’annulation («Cancel-Spektakel»).
15 Avr 2024
Andreas Faller est membre du comité d’initiative de l’initiative populaire «Oui à la sécurité de l’approvisionnement médical». L’objectif est de lutter contre la pénurie croissante de médicaments en Suisse. Le comité a sollicité le soutien du groupe des sciences pharmaceutiques {FG Pharma), une association regroupant tous les étudiant-es en pharmacie de l’Université de Bâle, qui a exprimé son soutien sur Instagram. Cependant, l’université a rapidement réprimandé l’association, arguant que la promotion d’une initiative politique sur les réseaux sociaux était contraire à ses directives. Andreas Faller qualifie cette décision comme «aléatoire», affirmant que l’initiative est «neutre» et bénéficie d’un large soutien. Cette controverse survient dans un contexte où la journaliste estime que c’est «depuis le début de la guerre au moyen-orient» que les universités suisses sont de plus en plus prudentes quant à leurs déclarations politiques en ligne, une théorie qui est partagée par le porte-parole de l’Université de Bâle Matthias Geering. Selon lui, une université, en tant qu’organisation du savoir, devrait adopter une position de désescalade et non prendre position. «Cela vaut en principe aussi pour les débats politiques en Suisse» et «Les incidents survenus dans le département Urban Studies ont montré qu’il était important de faire une distinction claire entre les prises de position personnelles et les prises de position institutionnelles.» Andreas Faller a en revanche souhaité une approche plus nuancée de la part de la direction de l’université. «Notre initiative n’a absolument rien à voir avec le problème de l’antisémitisme à l’Université de Bâle, et pourtant nous avons maintenant un dommage collatéral».
12 Avr 2024
Le Professeur et Psychiatre Panteleimon Giannakopoulos reprend ad interim la fonction de directeur de l’Office cantonal de la santé genevois. Le porte-parole suppléant du Département de la santé et des mobilités (DSM), Marc-André Siegrist, déclare que «l’expertise médicale du professeur, sa grande expérience des institutions publiques, ainsi que ses qualités humaines en font la personne idéale pour assurer le bon fonctionnement de l’Office, la continuité institutionnelle et les services à la population durant cette période de transition […] jusqu’à l’entrée en fonction de son successeur […] Le psychiatre pourra évidemment postuler pour rester». (Le Temps)
Néanmoins, cette nomination suscite des perplexités : «un ancien collaborateur proche du professeur et aujourd’hui en poste au sein du DSM voit cette nomination d’un autre œil. «C’est consternant. Je ne doute pas que ce soit quelqu’un de très intelligent, mais il entretient des rapports très durs et très toxiques avec les gens.» Et d’ajouter que «si l’on ne se soumet pas à sa personne et à ses projets, on devient rapidement son ennemi».» (Le Courrier)
12 Avr 2024
12 Avr 2024
Le problème croissant des fausses publications scientifiques est alimenté par un marché en pleine expansion, où des agences, les «paper mills» (moulins à papier), offrent des services d’assistance à la rédaction pour les publications. Les scientifiques paient jusqu’à 25’000 euros pour des contrefaçons bien réalisées et désormais «[g]râce à l’IA, ces faux et ces contrefaçons sont désormais de plus en plus faciles et rapides à fabriquer».
Le chercheur et éditeur de revue spécialisée en neurologie, Bernhard Sabel, a découvert l’ampleur du problème à l’aide d’autres chercheur·es : «A ce jour, nous estimons qu’au moins cent mille travaux scientifiques publiés sont suspects ou falsifiés […]. Cela ne concerne que la biomédecine. En extrapolant à l’ensemble de la science, on arrive à quatre à cinq cent mille travaux publiés et falsifiés chaque année – sur un total d’environ 5 millions de publications dans le monde. Cela donnerait un taux de contrefaçon d’environ 10 pour cent.» Les études falsifiées pourraient avoir des conséquences néfastes selon Jörg Meerpohl, Directeur de Cochrane Allemagne, une association internationale pour l’assurance qualité en médecine : «[l]es implications pour les patients seraient immenses si des recommandations de traitement étaient faites sur la base d’études fausses et fictives».
Bien que les grandes maisons d’édition cherchent de plus en plus de détecter les contrefaçons, la pression sur les chercheur·es pour publier en quantité, plutôt qu’en qualité, contribue à ce phénomène.
11 Avr 2024
En mars 2024 l’UNIL lançait le Fonds de soutien à la recherche partenariale «Interface», qui a pour but de financer et évaluer des projets de recherche collaboratifs et avec un impact social.
Cléolia Sabot, Coordinatrice d’Interface, répond à des questions sur le besoin qu’il y a eu de créer ce type de fonds. Ce n’est pas une nouveauté que l’UNIL fasse de la recherche partenariale, mais l’université veut davantage élargir ce type de collaboration, ainsi qu’élargir les partenaires de terrain avec lesquels elle collabore. En effet, un des objectifs serait «de ne pas travailler qu’avec des administrations ou des entreprises, mais d’avoir une diversité de partenariats […]. Par exemple […] une petite association qui aurait envie et besoin d’avoir des appuis scientifiques n’a pas toujours les moyens de le faire». De plus, ce besoin s’avère d’autant plus urgent que le Fonds National Suisse (FNS) peine à financer ce type de recherche : «le FNS tend davantage à financer des recherches fondamentales qui se font, la plupart du temps, dans le cadre exclusivement académique».
10 Avr 2024
Le premier symposium suisse sur la rétrospective et les perspectives de la politique de santé, sous le titre «Corona – Fakes und Fakten», a eu lieu à Berne où Daniel Beutler, médecin de famille et critique des mesures prises lors de la pandémie du COVID-19, «a réuni des personnes de tout le pays partageant les mêmes idées». Un des orateur·ices qui a pris la parole est l’ancien Conseiller fédéral Ueli Maurer, selon lequel «le gouvernement national a respecté tous les processus politiques», mais la science «aurait mal informé pendant la pandémie et provoqué des mesures trop violentes […], [qui] sont à leur tour à l’origine du profond fossé qui traverse la société jusqu’à aujourd’hui».
3 Avr 2024
Hanna Hilbrandt, Professeure de géographie sociale et de recherche urbaine à l’Université de Zurich, Carolin Schurr, Professeure de géographie sociale et culturelle à l’Université de Berne et Claske Dijkema, chargée de cours à l’Institut pour la diversité sociale et culturelle de la Haute école spécialisée bernoise, se penchent sur le débat qu’il y a autour des relations entre la science, la société et l’activisme politique.
Si les médias qualifient souvent les collaborations entre universités et société d’«activisme académique» et les directions des universités les qualifient souvent comme «idéologiques», les trois académiciens pensent que ces critiques «[ne sont] pas seulement contradictoire[s], [elles ignorent] également l’état de la recherche accepté au niveau international. Les collaborations science-pratique ont été fortement encouragées par l’État, les universités et le secteur privé au cours de la dernière décennie.»
Les trois académiciens tiennent a rappeler que «[l]es principes directeurs des universités suisses ne définissent pas seulement la liberté académique comme base centrale de l’innovation scientifique. Ils soulignent également la responsabilité de l’université d’aborder les questions de société. La collaboration transdisciplinaire avec différents groupes y apporte une contribution essentielle.»
26 Mar 2024
L’Université de Berne s’exprime sur la lettre ouverte « Pour la défense de la liberté académique en Suisse« . «La présentation de certaines circonstances dans la lettre ouverte est unilatérale et occulte des faits. […] L’Université de Berne n’observe aucune érosion de la liberté académique en son sein. La liberté de l’enseignement et de la recherche est en tout temps garantie à l’Université de Berne. Indispensable pour toute université, cette liberté telle qu’elle a été définie doit être protégée et défendue. Tous les collaboratrices et collaborateurs de l’Université doivent y prendre part.»
Par ailleurs, l’institut d’études du Proche-orient avait été dissout «Sur la base des conclusions du rapport d’enquête administrative […]. […] [L’université] répond ainsi à la demande d’en élargir l’objet de recherche et d’enseignement, qui était auparavant très étroit, et de placer le domaine d’études dans un contexte plus large incluant la recherche, la langue et la perspective historique. La dissolution de l’ISNO n’entrave pas la science et l’enseignement, mais, au contraire, en élargit l’horizon et en renforce la diversité. »
19 Mar 2024
Marc Chesney, professeur à la faculté d’économie de l’Université de Zurich, écrit: «Un aspect en particulier est resté dans l’ombre et interpelle. Il s’agit de la réticence du monde académique en finance à s’exprimer publiquement sur les causes et les responsables de la débâcle de CS. A quelques exceptions près, c’est plutôt le silence radio qui prédomine. Que ce soit avant, pendant et depuis cet effondrement, rares sont les articles des spécialistes universitaires. […] Ils auraient pourtant dû prendre position, ne serait-ce que par respect pour le contribuable qui les finance en grande partie. […] A quoi est dû cet effacement, ce manque d’analyse objective d’une telle crise? A un conflit d’intérêts, une capture cognitive du monde académique qui s’alignerait sur les points de vue de grandes institutions financières?»
19 Mar 2024
L’Institut du Moyen-Orient à l’Université de Berne a fermé ces portes récemment «à cause d’une situation intenable» : un collaborateur scientifique avait écrit sur le réseau X que l’attaque du 7 octobre était le meilleur cadeau d’anniversaire qu’il a jamais eu.
Reinhard Schulze, professeur émérite d’études sur l’Islam et en nouvelle philologie orientale, avait longtemps laissé la marque de l’Institut et affirme qu’il regrette profondément ce développement et blâme aussi le fait que ces successeurs n’auraient pas assez cultivé les liens avec le (grand) public en fournissant des expertises.
Selon un rapport d’enquête, il y avait un «corset idéologique» qui primait à l’institut qui qualifiait Israël comme un «peuple coupable» et les palestiniens comme les victimes. Reinhard Schulze affirme que cette perspective n’était pas présente quand il travaillait encore à l’institut. «Cela n’a rien à voir avec la science. […] Cette réduction, cette création de corps populaires est un concept politique très à droite à l’origine. Qu’une telle chose soit présentée comme une science par la gauche au 21e siècle est une horreur. […] Personne ne m’a jamais reproché, en tant que vieil homme blanc allemand, de ne pas parler de l’islam. Ce serait certainement différent maintenant ».» Il estime que cela fait déjà quelques années, que les études sur l’islam à Berne manquent de crédibilité. «J’aurais cependant souhaité que l’université s’engage plus fortement à ce que l’islamologie, en tant que discipline associée à la science du Proche-Orient, continue à occuper une place importante, y compris sur le plan institutionnel.»
19 Mar 2024
Michael Schaepman, Recteur de l’Université de Zurich, et Stephan Neuhauss, Doyen de la recherche de la Faculté de Mathématiques et Sciences Naturelles de l’UZH, ont inauguré le Musée d’histoire naturelle de l’Université de Zurich (NMZ), qui comprend quatre musées de l’UZH. Ainsi, le Musée Zoologique et le Musée Paléontologique ont été réunifiés lors de l’inauguration, alors que le Musée Anthropologique et le Musée Botanique feront officiellement partie du NMZ jusqu’au printemps 2025. Le point fort de cette nouvelle ouverture est l’exposition de quatre dinosaures qui ont été reçus en donation par l’UZH en 2019. Le Recteur de l’UZH explique que «[l]e Musée d’Histoire Naturelle fait vivre directement la recherche scientifique et montre dans un langage précis et pourtant simple comment parvenir à de nouvelles connaissances scientifiques». Dennis Hansen, Chef de projet du NMZ, ajoute que «[l]’unification des quatre musées sous un même toit et une seule administration n’est qu’une étape. La vision […] est qu’à l’occasion du bicentenaire de l’université en 2033, un musée plus grand sera inauguré et que d’autres musées de l’université rejoindront. Mais rien de concret n’a encore été décidé.»
14 Mar 2024
«De nouvelles lignes directrices pour l’engagement politique et le conseil politique basé sur la science sont en vigueur à l’ETH Zurich depuis février. Elles guident les membres de l’ETH qui souhaitent participer au dialogue entre la science et la politique. Benedikt Knüsel, chef de l’unité Interface science-politique, explique les principaux enjeux de ce champ de tension manifeste.»
13 Mar 2024
Le journaliste Peer Teuwsen craint qu’une baisse du nombre d’étudiant-es «dans les domaines qui encouragent l’esprit critique et le jugement nuancée», notamment en l’histoire et les lettres modernes, aurait des conséquences «dramatiques pour la Suisse», dans cette «époque de la pensée en noir et blanc […] Si l’on pense moins à l’ensemble et pas plus à soi-même, on ouvre la porte à une pensée volontairement simpliste, également appelée populisme […] [et] alimente les intérêts personnels et nuit à l’intérêt général. ».
Sebastian Bonhoeffer, directeur du Collegium Helveticum interdisciplinaire et professeur de biologie théorique à l’EPF de Zurich, déclare: «Il y a dans la formation universitaire un risque de spécialisation et de scolarisation excessives. Les étudiants ne sont pas des rouages que l’on façonne pour qu’ils s’intègrent parfaitement dans un engrenage. Il ne faut pas surestimer l’évaluation de l’utilité sociale de la formation universitaire à l’aide de valeurs chiffrées. Ce qui est facilement mesurable n’est pas forcément essentiel, mais ce qui est essentiel est souvent difficile à mesurer. C’est peut-être plus vrai pour les sciences humaines que pour les sciences dites exactes». Ainsi, les universités deviennent donc de plus en plus des lieux de formation.
Peer Teuwsen avance que la volonté politique était de renforcer les sujets appelé MINT (Mathématiques, informatique, sciences naturelles et techniqique), et cela a été fait avec grand succès. Mais «Ces louanges publiques constantes ont conduit à une confiance en soi exagérée des sciences naturelles par rapport aux sciences humaines.» Par ailleurs, les plans d’études pour l’école négligeraient l’apprentissage de l’allemand [en Suisse allémanique] au profit des apprentissages numériques, au point que «La moitié des jeunes de 15 ans en Suisse ne sont pas en mesure de comprendre un texte de manière appropriée, comme l’a montré la dernière étude Pisa». Et le journaliste déplore que les intellectuels suisses évitent le débat public, car «il ne favorise généralement pas la carrière intra-universitaire».
Peer Teuwsen salue l’engagement en faveur des sciences humaines de l’ancien chancelier fédéral Walter Turnherr, qui avait convoqué un groupe de travail sur l’histoire, invitant régulièrement des historien-nes renommé-es pour faire des «états des lieux historiques» et échanger avec différents parlementaires et conseillers et conseillères fédéraux sur un sujet d’actualité dans un contexte historique.
13 Mar 2024
Le professeur en histoire Caspar Hirschi de l’Université de Saint-Gall se soucie du niveau des connaissances enseignées en histoire à l’école. «J’y inclus des connaissances de base sur la naissance de notre démocratie semi-directe. S’ils étaient plus largement ancrés dans la population, il y aurait une plus grande appréciation de nos droits politiques. Cela est nécessaire, notamment chez les jeunes, pour une participation accrue aux élections et aux votations. […] Sans compréhension de l’histoire, il n’y a pas de construction d’avenir autodéterminée. C’est dangereux. […] Nous perdons le sens des acquis à défendre et à développer. […] Partout dans le monde, les régimes autoritaires gagnent du terrain et l’une de leurs armes, comme on peut le voir avec Poutine, est la falsification de l’histoire. Les démocraties ont besoin d’une conscience historique aiguisée pour pouvoir s’y opposer.»
Caspar Hirschi parle également de la baisse du nombre d’étudiant-es en histoire et spécule sur les raisons derrière cette tendance.
12 Mar 2024
Des personnes travaillant dans les universités de Berne, Bâle, Lausanne et Zurich ont rédigé une lettre ouverte «en défense à la liberté académique en Suisse» et l’ont fait circuler dans les universités». La lettre a été signée par environ 500 collaborateur·ices scientifiques de Suisse, en partie sous couvert de l’anonymat, [et environs 560 scientifiques étrangers]. La lettre ouverte, accompagnée des signatures, doit être remise dans le courant de la semaine aux directions des universités et à d’autres institutions académiques comme swissuniversities et le Fonds national suisse.
Les scientifiques s’inquiètent d’un climat «d’autocensure [qui] s’est installé parmi les scientifiques» et de «l’érosion de la liberté académique», suite aux événements du 7 octobre liés au conflit israélo-palestinien et regrettent un climat de plus en plus anti-intellectuel, indiquant que les attaques de certains médias et responsables politiques contre les sciences sociales et humaines se sont intensifiées depuis.
La NZZ minimise que ce sont «les «woke» qui «appellent au secours». «L’un ou l’autre des signataires peut avoir une certaine notoriété, mais la majorité semble être composée de personnes de rang inférieur : Étudiants, assistants, doctorants. De nombreux professeurs figurant sur la liste n’ont pas donné leur nom et se présentent sous l’appellation «Prof.»» Servan Grüniger, président de ReatCH, commente sur le réseau X que «ce sont aussi les déclarations de personnes «de rang inférieur» qui, dans le cas de l’Université de Berne et de l’Université de Bâle ont été critiquées par les médias et projetées sur des disciplines entières.