En février – mars 2024, plus de 1000 scientifiques [dont 531 de Suisse] ont signé une lettre ouverte à leurs organes de direction et aux médias exprimant leur inquiétude quant à la liberté de recherche, qu’elles estiment menacée par la pression du public sur l’enseignement et la recherche. «Ils appellent les directions des universités à renoncer à l’autocensure et demandent aux médias de rendre compte de manière différenciée et éclairante des domaines de recherche qui traitent de manière critique des structures de pouvoir, de l’attribution des rôles sociaux et des inégalités sociales.»
Paul Messerli, professeur émérite de l’Institut géographique de Berne, ancien doyen et président de la plateforme «recherche orientée» du FNS, avance: «Les sciences humaines remettent en question des opinions largement répandues. Souvent, les résultats de telles recherches soulèvent des questions sur la culpabilité historique et actuelle, qu’il s’agit ensuite d’assimiler socialement et politiquement, ce qui débouche bien souvent sur des hostilités et des remises en question des sciences humaines critiques. […] Il ne faut pas que, par autocensure, des thèmes de recherche disparaissent de l’agenda pour éviter le débat public. […] L’agitation politique, c’est-à-dire la promotion de positions idéologiques et politiques, n’a pas sa place à l’université, mais l’éclairage critique de ces positions sur la base de connaissances scientifiques, oui. Les représentant-es des académies sont appelés à faire de l’activisme politique, c’est-à-dire à transférer personnellement des connaissances scientifiques dans la politique, l’administration et la société. Car ils sortent ainsi de leur tour d’ivoire, cherchent le dialogue et se mettent au service de la société.»