Des chercheur·euses de l’Université de Zurich ont utilisé l’intelligence artificielle (IA) pour créer près de 1800 commentaires dans plus de 1000 fils de discussion sur Reddit, une plateforme en ligne sur laquelle les utilisateur·ices peuvent trouver des forums de discussion, et qui interdit tout usage non déclaré de l’IA. L’expérience cachée, qui s’est déroulée sur une période de quatre mois, de novembre 2024 à mars 2025, soulève des questions sur l’éthique dans la recherche.
Suite à la découverte de la manipulation, les administrateur·ices du Subreddit ont demandé à l’Université de Zurich de ne pas publier l’étude et de s’excuser publiquement auprès de ses utilisateur·ices. Dans leur réponse sur Reddit, les auteur·ices de l’étude se défendent et continuent d’insister pour que l’étude soit publiée. (NZZ) Les chercheur·euses admettaient avoir violé le règlement du forum, mais estimaient que «l’expérience était indispensable, compte tenu de son importance sociétale». Aujourd’hui, les comptes IA ont été bloqués, et Reddit envisage une action en justice. (Blick)
Martin Steiger, avocat et expert en droit dans l’espace numérique, affirme que «la fin ne justifie pas tous les moyens. La conception de l’étude est manifestement en contradiction avec les principes éthiques». (NZZ) Peter G. Kirchschläger, professeur d’éthique à l’université de Lucerne, avance que «la curiosité scientifique ne constitue pas une légitimation pour la tromperie et la manipulation de personnes dans un espace public». Le professeur ajoute que «d’un point de vue éthique, les dangers de la désinformation et de la manipulation des gens à l’aide de ce que l’on appelle l’IA sont immenses. Des réglementations globales sont nécessaires de toute urgence.» (Tages-Anzeiger)
Selon le médiateur de l’Université de Zurich, la commission d’éthique de la faculté de philosophie a indiqué aux chercheur·euses que les participant·es devaient être informé·es dans la mesure du possible et que les règles de la plateforme devaient être entièrement respectées. Toutefois, cela n’a pas été le cas. «Les évaluations de la commission d’éthique de la faculté de philosophie sont des recommandations qui ne sont pas juridiquement contraignantes», explique Rita Ziegler du service de presse de l’université de Zurich. La responsabilité de la réalisation du projet et de la publication des résultats incombe donc aux chercheur·euses elles·eux-mêmes.
Suite à cet incident, l’Université de Zurich déclare formuler à l’avenir des «recommandations plus fermes» à l’égard des scientifiques et surveiller de plus près les règles des communautés des plateformes sur lesquelles sont menées des études expérimentales. Le service de presse de l’université de Zurich a indiqué que «les chercheur·euses ont décidé de leur propre initiative de ne pas publier les résultats de leurs recherches». (Tages-Anzeiger)