L’historien Jonathan Pärli de l’Université de Bâle est le lauréat du «Prix pour la liberté académique» de la Société suisse d’histoire. En tant que doctorant, il a lutté pour avoir accès à des documents d’archives sur l’affaire Mathieu Musey, un renvoi qui a fait des vagues dans les années 1980. En effet, Jonathan Pärli avait du faire recours jusqu’au Tribunal fédéral et aura probablement accès aux documents en question en 2023, 5 ans après sa demande initiale, donc après son doctorat, et après le décès de Mathieu Musey en 2021.
Selon l’auteur de l’article,«L’affaire Pärli montre que le règlement prévu par la loi nationale sur les archives en cas de conflit, à savoir la voie juridique, ne fonctionne pas. Sans l’expertise juridique gratuite de son entourage privé, l’historien n’aurait guère pu s’engager avec succès dans cette voie. De plus, la vitesse d’escargot de la justice s’oppose à toute carrière scientifique. M. Pärli affirme que la loi sur les archives doit être révisée en faveur de la recherche. La loi met en balance les intérêts des personnes privées mentionnées dans les sources, c’est-à-dire la protection de leur personnalité, et l’intérêt du public à connaître le présent et le passé. Cela peut être un exercice d’équilibre. Dans le cas de Musey, cela n’aurait pas dû être le cas.»
D’autres scientifiques témoignent de leur difficulté d’accéder aux documents de l’histoire récente. Pour Michael Olsansky, historien militaire à l’EPF de Zurich, la consultation des dossiers de l’état-major général a été « arbitrairement limitée » pour la même raison, comme le dit ce dernier : « L’administration rend la recherche de plus en plus difficile ». Les scientifiques qui s’intéressent au thème du placement hors du foyer familial se heurtent eux aussi régulièrement à des barrières. L’une des raisons est l’autoprotection de l’administration : on ne veut pas s’exposer aux regards et créer un précédent. Une deuxième raison y est liée : la montée en puissance de la protection des données, pour laquelle les juristes et les éthiciens se mobilisent.